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Des archéologues découvrent un monde englouti vieux de 140 000 ans sous le plancher océanique, grouillant de bêtes géantes et d’une espèce disparue

Images d’illustration Pixabay

Une terre oubliée révélée sous la mer. Enfouie sous les eaux près de l’Indonésie, une terre oubliée a révélé des indices fascinants sur le passé lointain de l’humanité. Un crâne fossilisé et des milliers de restes d’animaux témoignent d’un monde prospère, aujourd’hui englouti par l’océan.

Une découverte qui bouleverse nos croyances

Au plus profond des mers, au large des côtes indonésiennes, une découverte remet en question les croyances les plus anciennes sur la vie humaine en Asie du Sud-Est. Dans une étendue d’océan entre les îles de Java et de Madura, des scientifiques ont mis au jour les vestiges de ce qu’ils décrivent comme le premier site fossilifère d’hominidés sous-marin jamais découvert dans la région.

Ce qu’ils pensent avoir découvert dépasse la simple collection de fossiles : il pourrait s’agir de la première preuve physique du continent préhistorique connu sous le nom de Sundaland, une masse terrestre qui reliait autrefois une grande partie de l’Asie du Sud-Est au Pléistocène.

Les premiers hominidés sous-marins d’Asie du Sud-Est

Outre le crâne, les chercheurs ont mis au jour 6 000 fossiles d’animaux appartenant à 36 espèces, dont des dragons de Komodo, des buffles, des cerfs et des éléphants. Crédit : ScienceDirect

La découverte porte sur deux fragments de crâne identifiés comme appartenant à Homo erectus, un ancêtre précoce de l’homme moderne. Selon ScienceDirect, les ossements, enfouis depuis plus de 140 000 ans sous des couches de limon et de sable, ont été récupérés dans le détroit de Madura lors d’opérations d’extraction de sable marin en 2011. Ce n’est que récemment que des chercheurs, dirigés par l’archéologue Harold Berghuis de l’Université de Leyde aux Pays-Bas, ont confirmé l’âge et l’espèce des restes.

Parmi les vestiges se trouvaient deux fragments de crâne humain – l’un frontal, l’autre pariétal. Leur morphologie ressemblait à celle des fossiles d’Homo erectus découverts précédemment sur le site de Sambungmacan, à Java. Les fossiles ont été datés par luminescence stimulée optiquement (OSL), une méthode qui détermine la dernière exposition des sédiments à la lumière solaire. Les chercheurs ont ainsi estimé que la vallée et son contenu dataient d’il y a entre 162 000 et 119 000 ans.

Une découverte fortuite révèle une faune spectaculaire

Cette découverte a eu lieu alors que des ouvriers près de Surabaya, capitale de la province de Java oriental, draguaient des sédiments du fond marin. Au cours des travaux de remise en état, ils ont découvert des restes fossilisés comprenant plus de 6 000 spécimens de vertébrés.

Le site, préservé par l’accumulation dense de sable et de dépôts marins, a révélé une étonnante diversité d’espèces : dragons de Komodo, buffles, cerfs et un genre aujourd’hui éteint d’herbivore ressemblant à un éléphant, le Stegodon, qui mesurait autrefois plus de 4 mètres de haut.

Preuves de vie le long d’une rivière perdue

Outre les restes squelettiques, l’analyse géologique a révélé le contour enfoui d’un réseau fluvial faisant autrefois partie de l’ancienne rivière Solo. Ce cours d’eau coulait probablement vers l’est à travers ce qui est aujourd’hui le plateau de la Sonde.

D’après les archives sédimentaires, cette rivière abritait un écosystème dynamique à la fin du Pléistocène moyen. La vallée où les fossiles ont été découverts accueillait autrefois une grande diversité d’herbivores et de prédateurs, notamment des espèces de cerfs dont les os et les dents ont été retrouvés disséminés dans la région.

Ces découvertes offrent un aperçu rare d’une région qui a finalement été submergée par la montée du niveau de la mer, il y a entre 14 000 et 7 000 ans. Les scientifiques estiment que la fonte des glaciers de la dernière période glaciaire a fait monter le niveau des océans de plus de 120 mètres, submergeant les plaines basses du Sundaland et coupant les connexions entre le continent sud-est asiatique et ses îles.

Les signes de boucherie : une chasse avancée

Enfoui sous le limon pendant 140 000 ans, le crâne n’a été confirmé que récemment comme étant celui d’Homo erectus, bouleversant ainsi nos connaissances sur la vie humaine primitive en Asie du Sud-Est. Crédit : ScienceDirect

Une analyse plus approfondie des ossements animaux a révélé des marques de coupe distinctes. Ces indices sont, selon les chercheurs, les preuves d’une boucherie délibérée. Ces marques suggèrent que les premiers hominidés de la région utilisaient des outils pour chasser et dépecer les gros animaux. «

Cette période est caractérisée par une grande diversité morphologique et une grande mobilité des populations d’hominidés de la région », a déclaré Berghuis. Les résultats indiquent que cette population ancienne s’est adaptée à son environnement grâce à des techniques de chasse relativement avancées pour l’époque.

Des fossiles d’espèces apparentées aux antilopes, qui préfèrent généralement les prairies ouvertes, renforcent l’idée que ce paysage submergé ressemblait davantage à une savane qu’à une jungle dense. La présence de grands herbivores et de cerfs suggère aussi que la région offrait d’abondantes sources de nourriture aux animaux et aux premiers humains.

L’empreinte croissante de l’Homo erectus

Les fragments de crânes récupérés dans le détroit de Madura étendent l’aire de répartition connue de l’Homo erectus en Asie du Sud-Est. Ces premiers humains sont connus pour leur stature plus grande et plus droite, ainsi que leurs jambes plus longues et leurs bras plus courts, des caractéristiques qui les rapprochaient des proportions humaines modernes. Leur présence au Sundaland apporte de nouvelles perspectives sur les migrations et l’adaptation des premiers humains aux paysages changeants de la région.

Un tournant pour la compréhension de nos origines

Ce qui a commencé comme une découverte fortuite par des mineurs de sable est devenu un tournant dans l’étude des débuts de l’histoire humaine en Asie. En combinant des méthodes archéologiques, géologiques et paléoenvironnementales, les chercheurs mettent au jour un chapitre oublié de l’évolution humaine, resté enfoui sous les mers pendant des millénaires.

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Publié par Laurent tourelle

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